Le Dr Jane Moran continue à faire œuvre de pionnière pour le Canada

Et la voilà repartie, faisant œuvre de pionnière. Cette fois, le Dr Jane Moran vient d’être nommée au groupe Jeux de la commission médicale du Comité international olympique en tant que sa représentante des sports d’hiver.

Elle est déjà reconnue comme présidente de la commission médicale de l’Union internationale de patinage (ISU), médecin urgentiste et de médecine sportive, ancien membre du conseil d’administration de Patinage Canada (de 1999 à 2009) et médecin à six Jeux olympiques d’hiver – Albertville, Lillehammer, Nagano, Salt Lake City, Turin et Vancouver (et dans quelques mois, Sotchi, aussi). En outre, le Dr Jane exerçait aussi ses fonctions de médecin durant le parcours de la flamme olympique en 2010, partout au Canada, où elle était protectrice de la flamme, confidente des masses, guérisseuse de lacérations et de bosses sur la tête de toutes sortes de gens ayant la larme à l’œil.

Bref, voilà le Dr Jane Moran. Qui aurait imaginé que cette femme provenant d’une petite ville de l’Ontario aurait pu se rendre aux plus grandes annales du sport dans sa profession? Ce n’aurait pas été difficile. Cinquième d’une famille de huit enfants (deux filles, six garçons), Jane allait patiner sur une patinoire en face du domicile familial à Walkerton, Ont. Son père, Joe, était un homme d’affaires (Moran’s Farm Equipment), maire de la ville pendant un certain temps et un mordu de sport. Au milieu de tout cela, Jane a tracé sa propre voie.

La philosophie de l’entraînement de son père était axée sur l’idée, peut-être outrée à l’époque, que de bons patineurs faisaient de bons joueurs de hockey. Ainsi, les huit enfants suivaient des leçons de patinage dans cette petite patinoire communautaire. La sœur de Jane, Mary Jo, la cadette des huit enfants, était une danseuse sur glace à l’ère de Tracy Wilson et Rob McCall. Mais, Jane et ses six frères jouaient au hockey. « Je n’étais pas du tout assez gracieuse pour être une patineuse artistique », a signalé Jane, la veille de son départ pour une conférence de l’Agence mondiale antidopage à Johannesburg, en Afrique du Sud. « J’étais en fait une bien meilleure joueuse de hockey ».

N’oublions pas que ceci se passait au début des années 1960. Il n’y avait pas d’équipes féminines à l’époque. Jane a joué dans une équipe de garçons jusqu’à l’âge de 10 ans. Elle devait participer à une compétition à Brampton, Ont., mais sa mère, Marie, lui avait interdit d’y aller. Son frère aîné était l’entraîneur de l’équipe et lorsqu’il est arrivé à Brampton avec ses joueurs de Bruce County, il a appelé sa mère : « Tu dois la laisser venir, lui a-t-il dit. Ils ont tous entendu qu’elle joue et tout le monde attend de voir cette fille qui joue au hockey. »

C’est ce qu’elle a fait. Jane y est allée, queue de cheval sortant de son casque, et a joué avec des joueurs comme Mark Howe, fils de Gordie Howe. Elle était la seule fille au tournoi, avec « 999 garçons », a-t-elle dit. Ceci était bien avant Justine Blainey, qui s’était taillé une place dans une équipe de garçons dans la ligue de hockey de la communauté urbaine de Toronto en 1981, mais à qui on a interdit de jouer parce que la ligue ne permettait pas de joueuses de hockey. Même le Code des droits de la personne de l’Ontario à l’époque permettait la discrimination sexuelle dans les sports. Des poursuites en justice ont suivi pendant de nombreuses années. Justine Blainey était une cause célèbre en raison de ce dont on l’avait privée. Jane était accueillie comme une curiosité.

Quelques années plus tard, Jane a joué au hockey à l’université, où elle a tout d’abord étudié l’éducation physique, puis est passée à la physiothérapie, une profession qui l’a menée aux Jeux olympiques de Montréal, en 1976.

Elle était sur le point d’être interviewée pour travailler comme physiothérapeute de l’équipe canadienne de ski, lorsqu’elle s’est rendu compte qu’elle voulait aller plus loin. Elle a étudié à l’école de médecine pour devenir un médecin urgentiste et elle a aussi fait un programme de médecine sportive la deuxième année qu’un tel diplôme a été offert.

Puis, elle s’est retrouvée dans des patinoires, un endroit où elle se sentait à l’aise. En tant que présidente de la commission médicale de l’ISU, elle assure le suivi des blessures qui deviennent plus courantes en patinage artistique et dans les deux disciplines du patinage de vitesse alors que les règlements changent et qu’une nouvelle technologie apparaît et, dans le cas du patinage artistique, des modifications à la notation qui exigent encore plus des athlètes. Jane affirme que l’ISU s’efforce d’assurer le suivi des blessures, pour voir comment elles changent en raison du système de notation.

Jane a vécu de nombreuses expériences remarquables, mais ses moments olympiques les plus mémorables n’étaient pas sur le terrain : ce fut les 106 jours passés comme médecin pour le parcours de la flamme des Jeux olympiques de Vancouver. « Ce fut un trajet incroyable », soutient-elle. « L’une des meilleures choses que je n’ai jamais faites dans ma vie. »

Elle a quitté son domicile à Victoria, le 28 octobre et n’y est retournée que le 1er mars. Elle a laissé une valise chez sa sœur, à Vancouver, puis s’est servie d’un sac de voyage pendant la durée du parcours. Elle a passé chaque nuit dans un hôtel différent. Elle s’est occupée de 300 personnes privées de sommeil et poussées à leur limite chaque jour pendant qu’elles traversaient le Canada au milieu de l’hiver. Personne n’est tombé malade.

Elle ne faisait pas seulement fonction de médecin. Elle s’occupait aussi des flambeaux et des lanternes. Elle se promenait dans la voiture des médias. Elle courait tous les jours, usant trois paires de chaussures de course. Elle se contentait de trois ou quatre heures de sommeil. Elle a rencontré les gens qui formaient le Canada, d’un océan à l’autre. « Chaque journée, c’était comme Noël », a-t-elle affirmé. « Je ne me sentais jamais fatiguée. C’était stimulant. »

Elle a rencontré un monsieur qui a déclaré que les deux choses les plus importantes dans sa vie étaient d’avoir servi son pays durant la guerre et d’avoir porté le flambeau. « Chaque jour était comme ça », a-t-elle avoué.

Elle a rencontré une femme « pleurant à chaudes larmes » à 100 Mile House, en Colombie‑Britannique, qui n’avait vu des parcours du flambeau olympique qu’à la télévision. « Jamais rien ne vient dans cette ville », a-t-elle dit. « Merci de nous avoir apporté le flambeau. »

Durant cette expédition magique, il a semblé que le reste du monde n’existait pas. Jane a chanté l’hymne national tellement de fois, qu’elle en a perdu le compte. Elle a essayé une fois, faisant remarquer qu’elle avait l’habitude de le chanter cinq fois avant midi.

Mais, l’expérience a laissé sa marque sur Jane, peut-être pour toujours. Elle ne peut plus chanter Ô Canada sans que les larmes lui montent aux yeux. Et, quatre ans plus tard, il lui suffit de raconter son expérience pour avoir la larme à l’œil.

C’est quelque chose qu’elle garde toujours à l’esprit, peu importe où elle va.

Beverley Smith

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