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Patrick Chan cherche à reconquérir le sommet par la danse à claquettes

La première image du triple champion du monde, Patrick Chan, faisant son retour après une année sabbatique était celle-ci : l’exécution de Mack the Knife dans une froide patinoire de Vaughan, son mouvement d’ouverture une merveille avec ses grosses poussées-élans caractéristiques, un grand bond, son corps s’élevant dans les airs, les bras étendus vers le haut. Il a rempli la patinoire avec ce mouvement d’ouverture. C’était comme s’il annonçait, avec son corps : « Me voici. C’est moi. Je suis de retour. »

Et, de retour avec une différence.

Comment est-ce différent? Il patine au son de musique vocale pour la première fois, de façon compétitive. Il applique ce qu’il a appris de son année de patinage dans une série d’une quarantaine de spectacles, soir après soir. Il est plus engagé avec le public que jamais. Il a trouvé un nouveau charisme. Il a laissé derrière l’intensité de son sérieux, non qu’il ne le sera pas. Mais, il patinera pour l’amour du patinage cette année. Il verra jusqu’où son dur travail le mènera. Et, il s’entraînera différemment, avec plus de confiance et de prudence, pour préserver ce corps qui aura bientôt 25 ans, l’un des plus vieux à l’heure actuelle.

« Il va faire ce grand retour », a signalé le chorégraphe David Wilson. « Je dois reconnaître qu’il fait preuve de beaucoup de courage, mais il semble aussi très enthousiaste. »

Patrick admet que les germes de son retour ont été plantés à la cérémonie de clôture des Jeux olympiques de Sotchi, lorsque les Russes ont cédé les rênes à la Corée du Sud. « J’ai pensé que je ne voulais pas mettre fin à ma carrière », s’est rappelé Patrick. « Je ne croyais pas qu’il s’agissait d’une bonne fin. C’était la fin d’un chapitre, mais j’aimerais en commencer un nouveau. »

Il ne sait pas, à vrai dire, s’il continuera jusqu’en 2018. Il verra, un an à la fois. Mais, c’est le but ultime. Il ne sait pas ce qui va arriver. Maintenant, il doit prêter attention à la récupération. Le corps en prend un coup dans ce sport. « Je veux conserver mon corps, de sorte que durant la compétition, je puisse vraiment être frais et faire face aux jeunes patineurs », a-t-il déclaré.

Surtout, il veut laisser une marque sur le sport et, cette saison, il l’espère « une bouffée d’air frais ». Il le fera avec son nouveau programme Mack the Knife, qui vise à montrer l’amour du patinage, malgré l’intensité de la compétition. Le programme ne sera pas uniquement axé sur les quadruples sauts, bien qu’il sache qu’on ne peut les omettre.

Le programme rappelle son année de tournée, la saison dernière. Il a énormément appris de cette expérience – gagnant tout particulièrement en confiance. Patrick affirme qu’il a beaucoup appris du patinage avec Scott Moir et de sa maîtrise de la glace. « C’est une habileté qu’on acquiert seulement au fil du temps et avec l’expérience, et honnêtement, ce fut la plus belle expérience pour moi cette dernière année », a-t-il avoué.

Sur la glace, David Wilson porte des gants rouges, qui accentuent davantage ses mouvements. Il montre à Patrick la voie. « Donne à tes doigts un peu de personnalité » dit-il en montrant à Patrick des mouvements de Mack, mais en même temps, bougeant aussi ses épaules. David a eu l’idée de patiner sur la musique de Mack the Knife, pensant tout d’abord à la version traditionnelle de l’œuvre emblématique de Bobby Darin. Mais, ensuite, il a entendu la version de Michael Bublé et a pensé : « Ce morceau est trop irrésistible. » De plus, Bublé est un Canadien. Et, Patrick l’a rencontré.

L’entraîneure Kathy Johnson a tout d’abord suggéré l’idée que Patrick apprenne l’essence de la danse à claquettes, afin d’injecter cette saveur dans le programme tape-à-l’œil. Kathy a trouvé un ami, Lucas Beaver, un Monsieur tout-le-monde artistique qui, à l’origine, devait passer une heure et demie par jour dans le studio avec Patrick, pendant quatre jours. Mais, Patrick aimait tellement le travail qu’il a fini par travailler avec Lucas trois heures par jour pendant cinq jours. « C’est une des choses les plus difficiles que j’ai jamais faites », a affirmé Patrick. « Plus difficile que le hip-hop ou le ballet de très haut niveau. ».

Il est difficile pour un patineur habitué à des chaussures rigides de patins de s’adapter au mouvement de la danse à claquettes. Pour cette danse, un danseur garde les chevilles détendues et « en quelque sorte pendantes, tout en faisant preuve de force », a signalé Patrick. Il ne fera pas de danse à claquettes sur la glace, mais il en rendra le caractère mielleux.

« Au cours des six derniers jours, il est devenu tout un danseur à claquettes », a déclaré David. « Son nouveau nom est Twinkle Toes. Mon ami Lucas a dit qu’il a appris la danse à claquettes plus vite que la plupart des danseurs qui n’en avaient pas fait auparavant. » Patrick est maintenant un claquetiste à part entière, comptant un programme complet au sol, enregistré sur vidéo.

Le programme libre de Patrick est en fait une version modifiée du pot‑pourri de Chopin qu’il a utilisé l’an dernier pour remporter le championnat japonais ouvert, sa seule compétition de la saison. En fait, David a trouvé trois morceaux de Chopin qui semblaient aller l’ensemble, comme si le compositeur les avait créés dans la même ambiance. Le premier s’appelle « La révolutionnaire », un hommage au style de patinage singulier de Patrick. « Ce fut une tâche que j’ai accomplie pour le plaisir », a déclaré David.

Mais, le programme a été remanié, avec quelques nouveaux éléments et petites modifications. Patrick affirme que c’est une version plus « avancée » et les nouvelles difficultés qu’elle présente l’ont frustré au début. « J’avais déjà eu mon élan de frustration, parce que c’est tellement dur », a-t-il dit. « Le patinage devient tellement difficile maintenant, car tous les hommes font des quadruples sauts. J’imagine que c’est de ma faute. Je l’ai un peu cherché. » Mais, depuis la dernière saison, il a appris des choses importantes : avoir confiance qu’il y parviendra, à l’instar de la chorégraphie apprise hâtivement pour les spectacles. Et, qu’une approche détendue est préférable. Il l’a appris au championnat japonais ouvert, la saison dernière, quand il s’est rendu compte qu’il n’y n’avait aucun besoin de s’inquiéter, il a participé à l’événement et l’a quitté pour une année de plaisir.

Avant sa séance de chorégraphie avec David, Patrick a passé huit jours à faire du surf au Costa Rica, comme dernière activité amusante de l’année pendant laquelle il n’avait pas à se soucier de se blesser. Maintenant, il est temps de s’atteler à la tâche. Il sait qu’il est loin d’être en forme, mais David a dit que Patrick peut se mettre en forme rapidement. Il est déterminé à travailler dur, ce qui l’aidera à relaxer par la suite.

Et, tout ce qui peut arriver à l’avenir dans sa carrière? « Ce sera vraiment la cerise sur le gâteau », s’est exclamé Patrick.